L'Inform'Pro de Novembre 2024
Une campagne de soutien aux apprentis – Alors que le financement de l’apprentissage reste une question non résolue, le gouvernement a lancé une campagne pour permettre aux 50 000 jeunes inscrits en formation de trouver une entreprise. Cette campagne s’appuie notamment sur la plateforme 1jeune1solution et sur les cellules régionales interministérielles d’accompagnement vers l’apprentissage.
Les apprentis ciblés par le PLFSS - En amont du PLFSS, 2 inspections (IGAS et IGF) avaient notamment proposé 3 mesures :
- L’abaissement du seuil d’exonération de cotisation sociale des apprentis de 79% à 50% du SMIC ;
- L’assujettissement à la CSG et à la CRDS de la rémunération des apprentis au-delà de 50% du SMIC (alors qu’ils en sont totalement exonérés)
- La suppression de l’aide à l’embauche d’apprentis pour les niveaux 6 et 7 (licence et master).
Les 2 premières mesures sont reprises dans le PLFSS, alors que la 3ème n’est pas explicitement mentionnée. Dans le texte issu de la commission mixte paritaire, les contrats soumis à la CSG-CRDS seraient ceux conclus après le 1er janvier 2025.
Une modulation de l’aide à l’apprentissage – La ministre du travail a déclaré à plusieurs reprises qu’elle préférait une modulation des aides à l’embauche d’un apprenti en fonction de la taille des entreprises plutôt qu’en fonction du niveau de diplômes. Une proposition qui a trouvé un écho du côté du Sénat lors des discussions du budget lors du PLF. Face à un coût total de 25 milliards d’euros pour l’apprentissage, le gouvernement prévoit de réduire les crédits de 663 millions d’euros en 2025. Les sénateurs proposent de cibler les aides, notamment en excluant les grandes entreprises employant des apprentis de niveau supérieur à bac +2. Ils recommandent également de limiter le financement (NPEC) des formations de niveau licence et master à 90% et 80% respectivement, pour réduire les dépenses publiques tout en maintenant l’efficacité du soutien à l’apprentissage.
Essor de l’apprentissage : quel bilan et quelles perspectives ? - C’était le thème d’une conférence organisée au ministère de l’économie le 12 novembre dernier. L'explosion de l'apprentissage a eu lieu principalement sur les hauts niveaux de diplômes, mais sans bénéfice en termes d'insertion professionnelle. Selon l'économiste Pierre Cahuc, la rétention dans l'entreprise de formation explique la différence de taux d'insertion entre l'apprentissage et le lycée professionnel. Cependant, les coûts de l'apprentissage sont importants, estimés à 20 000 euros par an, et les ex-apprentis commencent à arriver de plus en plus nombreux au chômage. En 2023, le nombre d'apprentis entrés à l'assurance chômage a plus que doublé par rapport à avant la crise covid, représentant 770 millions d'euros de dépenses d'indemnisation. Les anciens apprentis représentent déjà 8% des entrées au chômage (soit 165 000 entrées), et un apprenti sur 5 arrive au chômage après son apprentissage.
L’ANDRH demande la fin de la limite d’âge - L’Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH) propose de supprimer la limite d’âge pour les contrats d’apprentissage. Actuellement, cette limite est fixée à 29 ans, avec des exceptions jusqu’à 35 ans. L’ANDRH estime que l’élargissement de l’apprentissage à tous les âges faciliterait la reconversion professionnelle et le maintien des compétences des salariés. Le dispositif Transco, bien que pertinent, est jugé trop complexe. L’ANDRH souligne également que les politiques publiques en faveur de l’apprentissage ont été un succès, avec un million d’apprentis dont 70% trouvent un emploi. Pour la CFE-CGC, l’ANDRH confond pédagogie et enveloppe financière puisqu’elle mélange formation initiale et transition professionnelle tout au long de la vie.
Une nouvelle méthode de calcul des NPEC – Les NPEC seraient d’abord déterminés par France Compétences qui proposerait une valeur de référence, « par certification ou regroupement de certifications, autour de laquelle les branches pourront faire évoluer les NPEC, à la hausse mais aussi à la baisse, dans un cadre de soutenabilité financière fixé, au niveau de chaque branche, par la gouvernance de France Compétences. », donc un choix dans une enveloppe fermée. C’est en tout cas ce que prévoient les premières discussions relatives à la concertation avec la ministre du Travail.
Une approche qui suit certaines recommandations de l’IGAS - Le rapport de l’Igas sur la régulation financière des centres de formation d’apprentis (CFA), publié en novembre 2024, propose trois scénarios pour réformer leur financement. Ces scénarios visent à améliorer la fixation des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage (NPEC). Le premier scénario repose sur une priorisation des branches professionnelles en modulant les NPEC autour d’une moyenne sectorielle. Le deuxième scénario (2a) propose un financement socle fixé par les pouvoirs publics, complété par des financements conventionnels spécifiques. La variante 2b permettrait aux branches de moduler légèrement certains financements, en réduisant ceux des formations moins prioritaires pour compenser. Ces approches cherchent à concilier équité, flexibilité et contrôle des coûts. Parmi ses 25 recommandations, l’Igas préconise également la création d’une direction de projet pour superviser cette réforme, et propose des mécanismes pour prendre en compte la qualité des CFA, comme un financement complémentaire basé sur l’insertion des apprentis et des taux de satisfaction. Elle suggère aussi des ajustements pour simplifier le financement des investissements, en transférant certaines responsabilités des régions aux Opco. Enfin, le rapport insiste sur la nécessité de fiabiliser les données comptables des CFA, avec 17 recommandations spécifiques. Cela inclut la standardisation et le contrôle renforcé des données remontées, des sanctions en cas de défaillances, et une meilleure coordination entre France compétences, les Opco et les régions. Ces mesures visent à garantir la transparence et l’efficacité dans l’allocation des ressources, tout en répondant aux besoins des entreprises et des apprentis. Nous rappelons que la CFE-CGC défend une valeur unique par diplôme avec un complément possible par les branches et ceci depuis plus de 5 ans.
La loi de fin de gestion 2024 promulguée – Fin 2023, le projet de loi de fin de gestion a succédé aux anciens projets de loi de finances rectificative (note : c’est la loi qui est rectificative). Le projet de loi prévoit un montant conséquent de 5,6 milliards d'euros d'annulations nettes de crédits, principalement sur des crédits mis en réserve. Le ministère du Travail en sort légèrement gagnant avec un solde positif de 65,5 millions d'euros en crédits de paiement. Cependant, ce montant est essentiellement porté par un crédit supplémentaire pour le financement de l’aide au recrutement d’apprentis (+350 millions €).
Le contrat de professionnalisation expérimental prolongé ? - Le contrat de professionnalisation expérimental, mis en place par la loi "Avenir professionnel" en 2018, a été prolongé jusqu'à fin décembre 2024. Pour rappel, ce contrat permet d’acquérir des compétences opérationnelles sans obligation d’obtenir une qualification ou une certification complète. Malgré l'irrecevabilité d'un amendement gouvernemental au PLF 2025 pour pérenniser ce contrat, le ministère du Travail et de l'Emploi a affirmé son intention de le pérenniser dans le droit commun. Les résultats de l'expérimentation sont jugés positifs, avec 35 356 contrats conclus entre 2018 et 2023, principalement destinés aux publics éloignés de l'emploi. Le ministère estime que ce contrat a permis de répondre aux besoins de recrutement en créant des parcours de formation plus courts et a contribué à insérer ou réinsérer par l'emploi.
Des nouvelles du contrat engagement jeunes - La ministre du travail et de l'emploi, Astrid Panosyan-Bouvet, a été auditionnée par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances (PLF) 2025. Le CEJ, un dispositif qui vise à accompagner les jeunes éloignés de l'emploi, a rencontré son public avec 792 000 jeunes signataires entre mars 2022 et septembre 2024. Les premiers éléments d'évaluation du CEJ en matière d'accès à l'emploi sont encourageants, avec 55 % des jeunes sortis du dispositif en emploi et 33,5 % en emploi durable. Les moyens alloués au CEJ dans le PLF 2025 permettront de pérenniser le dispositif. Cependant, « les missions locales, auxquelles le président Macron a demandé d'ouvrir le robinet du CEJ en 2022, doivent maintenant réduire la voilure », selon Océane Godard (députée PS), en dépit des besoins des jeunes en difficulté. Les députés ont souligné la nécessité de simplification administrative, de développement et de qualité de l'offre d'activités proposées aux jeunes, ainsi que la nécessité de renforcer la coordination entre les missions locales et France Travail.
La certification de l’expérience syndicale - Un colloque organisé par Miroir social a mis en avant les efforts pour certifier les compétences des élus du personnel, mais a également souligné les limitations de ce système. L'État reconnaît des équivalences entre six domaines de compétences des mandatés et des titres professionnels de niveau Bac à Bac+2, mais seuls 300 représentants du personnel se sont fait certifier jusqu'à présent, contre 1 000 attendus pour 2020. Les formations de l'Afpa se déroulent désormais à distance, ce qui devrait améliorer les choses, mais les titres visés n'ont pas beaucoup d'intérêt pour les cadres. La CFE-CGC a publié un guide pratique des formations dispensées par les universités et les grandes écoles adaptées à ses militants.
Le CPF fête ses 10 ans - Le compte personnel de formation (CPF) célèbre ses 10 ans et sa plateforme "Mon compte formation" ses 5 ans. Avec plus de 7,3 millions de dossiers financés entre 2020 et 2024, le CPF a permis de développer l'accès à la formation. La ministre du Travail, Agnès Panosyan-Bouvet, souhaite encourager les cofinancements entre les entreprises, les branches professionnelles et les régions pour répondre aux enjeux de reconversion et de compétitivité. Pour cela, elle encourage les entreprises et les branches professionnelles à intégrer le CPF dans leur politique de développement des compétences. La CFE-CGC rappelle que le cofinancement devrait améliorer la pertinence des formations mais nécessitera un besoin de financement très conséquent, de l’ordre de 5 milliards en régime établi !
La régulation des formations d’aides à la création d’entreprise - Le gouvernement souhaite réguler l'accès aux actions de formation à la création et à la reprise d'entreprise en limitant l'éligibilité au CPF aux formations conduisant à une certification inscrite au RNCP ou au RS. Les formations Acre, qui ont été rendues éligibles au CPF sans exigence de certification, seront ainsi alignées sur le régime commun d'éligibilité. Actuellement, il existe près de 300 formations Acre différentes menant à une certification proposées par 143 organismes de formation, et leur part dans l'ensemble des actions de formations à la création d'entreprise a presque quadruplé entre 2022 et 2024.
L’AFPA défend son bilan - L'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) a publié une étude révélant une économie sur les finances publiques de 121,6 millions d'euros grâce à l'accompagnement vers la réinsertion professionnelle de plus de 70 000 chômeurs. Les formations proposées par l'AFPA permettent une insertion plus importante et durable que les autres organismes de formation, avec un taux d'insertion de 71% contre 58% pour les chômeurs non formés. Les formations AFPA sont plus longues et coûteuses, mais génèrent des retombées économiques plus importantes, avec une moyenne de 1 654 euros par bénéficiaire.
La rupture des contrats d’apprentissage – Selon une note de la DARES publiée fin octobre, 36% des contrats d’apprentissage commencés en 2018 ont été rompus avant la date prévus. Parmi eux, environ 1/3 rebondissent dans un nouveau contrat d’apprentissage, et les 2/3 restant ne sont plus en apprentissage. La probabilité de rupture décroît avec le niveau de diplôme (42% au niveau du CAP, et 27% au niveau du bac+2). Pour un même diplôme, les apprentis plus âgés connaissent un risque de rupture plus élevé. La motivation du jeune à exercer le métier auquel il se forme ou son intérêt pour l’apprentissage jouent moins nettement. La motivation du jeune à exercer le métier auquel il se forme ou son intérêt pour l’apprentissage jouent moins nettement : l’orientation, en soit, aurait ainsi un impact limité sur la rupture. A noter que le rôle et l’implication des parents est déterminant d’entrer en apprentissage ou de rechercher un employeur. Sans surprise, certains secteurs sont davantage touchés par les ruptures de contrat, comme l’hébergement et la restauration, la coiffure ou l’industrie agro-alimentaire. Par ailleurs, plus une entreprise est petite, plus le risque de rompre un contrat est élevé. Les conditions de travail influencent fortement la stabilité des contrats d’apprentissage. Une mauvaise ambiance, des missions inadaptées ou un manque de soutien augmentent le risque de rupture.